08/01. Vic vient à peine de remettre les pieds à Edenton, ça fait trois jours. A peine revenue, déjà au charbon. En même temps, ce n'est pas comme si elle avait le choix, n'est-ce pas ? Heureusement, elle a travailler dans pas mal de bars du coin et sa réputation la précède. En fait, sa réputation la précède autant derrière que devant le comptoir, voire même en dessous si j'ose dire. Bref. Elle est bien contente de bosser au Gouvernor's, elle connaît un peu la clientèle, des gens simples qui ne font pas de chichi. Les bars lounges peuplés de riches, elle les aime quand elle y est cliente - pour ne pas dire michto. Occupée à passer les racks de verres sales à la machine, chantonnant pour elle-même, elle ne remarque pas tout de suite le client installé au comptoir. Quand elle lève les yeux et l'aperçoit, elle ne sait pas depuis combien de temps il est installé. Bonjour, désolée j'vous ai pas entendu arriver. Vous savez ce que vous voulez ? Large sourire sur les lèvres, parce que les clients tips beaucoup mieux quand c'est le cas. Elle passe un coup de chiffon sur le bar tout en observant l'homme qui se tient en face d'elle. Plutôt agréable à regarder, l'air un peu trop propre sur lui peut-être mais tout à fait appétissant.

Franchement, j'étais explosé. Ma vie était toute explosée. Mon meilleur ami me faisait prendre conscience a quel point parfois je donnais trop pour ma soeur et je me zappais totalement. C'était des moments en dent de scie. J'avais tout donné pour elle et parfois, elle se foutait clairement de la gueule du monde. J'étais juste outré. Je comprenais qu'elle puisse voir quelqu'un, qui elle voulait a vrai dire, au fond, je le comprenais, mais fallait rester cohérente et là, ce n'était pas le cas. Lola n'avait pas voulu rester chez nous (Rylan et moi) parce qu'elle se sentait de faire sa convalescence chez elle et surtout pas dans l'ambiance coloc' puis d'un coup, après 7H loin de chez nous, elle voulait finalement bien voir Rylan ?! la blague non... J'avais eu comme un coup et je comprenais que je me prenais trop la gueule pour elle alors j'avais décidé de claquer la porte pour le moment sur tout ça. Je prenais ma veste dans l'entrée. Je sortais mon téléphone de ma poche et je le mettais sur silencieux après de nombreux échanges avec les deux protagonistes. Je sortais et débutais ma marche. Je plaçais mes écouteurs sur mes oreilles et lançais ma musique sur le téléphone. J'entrais dans mon monde, mélancolique. Je regardais le sol, les mains dans les poches et je prenais mon rythme réfléchissant sur ma vie. Je marchais sans aucun arrêt, sans aucun intérêt pour le reste. Je remettais nerveusement le col de ma veste en cuir en place avant de ramener mes mains à nouveau dans les poches de la veste et poursuivre ma réflexion. Bientôt, je me retrouvais devant le "Governor's Pub". Je regardais l'enseigne un instant et je me décidais donc à enlever mes écouteurs. Je rangeais dans mes poches avant de poser ma main sur la poignet. Je ne tardais pas à entrer d'un pas sur. Je me rendais alors au bar et je me posais sur un des ces hauts fauteuils, tapotant doucement sur le fer du bar de mes longs doigts comme pour m'occuper, gérer mon stresse et mon énervement. Bientôt, la barmaid se retournait vers moi, s'excusant déjà de ne pas m'avoir vu et je laissais un petit sourire s'affichait. Ce sourire ne peut partir tant la brune affiche un sourire éclatant et déroutant. Je lui répond : Bonsoir ! Hum... Rhum épicé, enfin Rhum brun coca c'est possible ? Dis-je en me reprenant sachant que tout le monde ne connaissait pas l’appellation du Rhum épicé pour brun ! Je passais nervesement ma main dans les cheveux et reprenais : Je vois qu'il n'y a pas grand monde au bar, c'est possible de rester là pour boire son verre ? J'affiche un sourire timide. Je sais qu'on ne peut pas dans certains bars pourtant c'est plus simple pour se faire plaisir niveau boisson ! Dis-je en ponctuant d'un petit rire et sans me prendre au sérieux.

Le début de soirée était plutôt calme, surtout pour un vendredi, et Victoria s'ennuyait clairement. Elle détestait ces entre-deux pendant les services où en entendrait presque une mouche voler. C'est parti ! Elle attrape un verre, cherche la bouteille de rhum quelques secondes sur l'étagère - elle prend ses marques - et prépare la boisson, qu'elle pose ensuite devant son client. Il lui demande s'il peut rester installé au bar pour consommer comme s'il jouait sa vie, elle hoche la tête positivement avec un sourire amusé. Pas d'humeur à l'envoyer balader, et de toutes façons, il avait raison, ce n'était pas pour le peu de clients qu'il allait gêner. Ca va, y a personne pour le moment vous allez pas gêner, et puis vous pourrez me tenir compagnie. Une serveuse est en salle, d'autres collègues vont bientôt arriver pour le coup de feu, mais pour l'instant ça lui fait quelqu'un avec qui discuter. Surtout, il a précisé avoir envie de se faire plaisir niveau boisson alors si elle peut pousser à la consommation, elle ne va pas se gêner. Elle pose ses coudes sur le comptoir, joint ses mains et pose son menton dessus. Vous êtes du coin ? Elle demande, aimable, sur le ton de la conversation.

Éreinté. Vexé. Nostalgique. J’avais bien besoin de me faire plaisir et une jolie soirée boisson venait de s’organiser dans mon esprit. J’étais à présent au bar prêt à me mettre « une race » comme dirait certains! La serveuse ne fit aucune réflexion sur ce petit beug concernant la boisson et se contenta d’aller préparer ma douce mixture. La brune me l’apports donc et déposa le verre rempli sur le bar face à moi. Je la remerciais d’un hochement de tête et trempa les lèvres appréciant la légère brûlure dans mon gosier. Parfaitement dosé ! Dis-je aimable. La jolie serveuse m’expliqua que pour le moment, je ne gênerais guère et que je pouvais rester là ajoutant que je lui tiendrais compagnie. Je souriais à nouveau et je tendais ma main : Emrys ! Dis-je pour me présenter d’une poignée de main. Je ne parlais pas de mon nom de famille car si elle était lectrice ne serait ce que du New Yorker, friande du net ou autres, j’allais encore être Emrys l’écrivain star : beurk! Je repris ensuite : oui je vis ici depuis peu ... ma sœur vivait depuis quelques années et je viens donc de m’installer il y a un ou deux mois ! Je bus une nouvelle gorgée avant de reprendre : Et vous ? Vous travaillez ici depuis longtemps ? Je passais une main dans mes cheveux rebelles.

Vic répond à la poignée de main en souriant. Pour une fois que ce n'est pas un client complètement bourré qui la traite comme la fille de joie du coin, c'est appréciable. Vic, enchantée. C'est une habitude de se présenter par son surnom, peu de gens l'appellent Victoria. Sa famille exceptée. C'est mignon de venir rejoindre sa famille, même si j'aurais pas choisi Edenton quitte à déménager. Elle a une petite moue. Et dire que des gens viennent s'installer ici de leur plein gré. Vic retient surtout que c'est pour sa soeur qu'il est là, et il a dit je viens de m'installer, pas nous, il y a donc une petite chance qu'il soit célibataire. Depuis hier en fait, mais j'suis née ici, j'viens tout juste de rentrer. Elle ne s'étend pas plus sur le sujet, il reste un inconnu. Se tournant un instant, elle se fait couler un café.

La serveuse se montre positive et ne me refuse pas les présentations. Elle se présente comme Vic, je vais pas pousser et simplement supposer qu’on est sur une demoiselle Victoria ou Victoire ? Je souris suite à sa réponse. Bien sûr, la dénommée Vic ne manque pas de réagir à mes paroles concernant mon arrivée à Edenton. Je comprend que certains ne soient pas friands du coin : ce n’est pas le grand luxe des États Unis ! J’ai un petit rire. Oh j’aime bien cette ville en tout simplicité ! dis-je très sincère. Il y a pas mal de personne de mon entourage au final qui se retrouve là sans concertation ! Je lui adresse un nouveau sourire. Je passe une main dans mes cheveux avant d’engloutir ma liqueur qui me met le feu au gosier. Je pousse le verre vers elle avec un léger rire pour lui faire comprendre du regard qu’elle peut en remettre un. C’est à son tour de m’apprendre un truc sur elle. La jeune serveuse m’explique être née à Edenton et revenu ici. C’est donc un retour aux sources ! M’exclamais-je assez étonné.Vous... enfin on peut se tutoyer ? Demandais-je poliment. La jeune femme ne semble pas dans la contrainte suite à la demande. Je reprend : Du coup, tu es revenue dans quel but ? Tu n’as pas l’air d’être fan et pourtant tu reviens ? Je me montre soucieux de comprendre sa situation.

Toute simplicité, c'est l'moins qu'on puisse dire... Elle lève involontairement les yeux au ciel, fâchée d'avoir dû revenir dans le coin. En même temps, si elle n'avait pas eu Kimmy et Kris pour l'accueillir de nouveau à la coloc, les choses auraient été bien plus compliquées. Donc, elle pouvait se plaindre encore et encore, elle n'était finalement pas si malchanceuse. Il finit son verre cul sec et elle le regarde avec de gros yeux. Sacré descente, soit il est alcoolique, soit il a une grosse pilule à faire passer... ou les deux ? Elle lui ressert un verre avant de boire une gorgée de son café, résistant à l'envie de se servir un shooter - restons pro. Pas d'problème. Elle répond à sa demande de tutoiement, en souriant. Après tout, il a l'air d'être là pour un moment. J'ai pas vraiment eu le choix. Pour faire court, j'étais partie m'installer avec un mec, ça s'est mal fini, j'avais plus de thunes... donc me revoilà. Elle a un sourire amer sur les lèvres. Et toi, si t'es si content d'être ici, pourquoi tu t'enfiles des verres à la vitesse de la lumière ? Un peu trop abrupte, peut-être, mais Victoria a du mal à s'embarasser des conventions. Tourner autour du pot, c'est pas son truc, et s'il doit repartir du bar en titubant, autant savoir pourquoi. Curiosité mal placée, oui.

La demoiselle avait vraiment l'air de ne pas apprécier cette ville et sa fameuse simplicité. Je ne pipais donc plus mot sur le sujet. On avait tous nos gouts après tout. Après avoir accepté le tutoiement, la demoiselle me raconta un peu son histoire et la raison de son retour. Outch! Je grimaçais. Les filles le diront : c'est souvent à cause de nous les mecs ! Je suis désolé pour toi. Il était pas top avec toi en gros ? Dis-je me montrant intéressé à l'écouter. Si je pouvais me sentir plus utile qu'avec ma petite sœur. Bien sur, la barmaid ne pouvait que rebondir sur ma joie de cette ville vis à vis de mon état de ce soir, cette envie de boire des verres. Je soupirais. Ma sœur a eu un accident. Dis-je d'un air grave. Elle est sortie, on avait convenu qu'elle viendrait chez moi où j'heberge aussi mon meilleur ami avec qui elle s'entend bien et au final, elle a attendu que je parte alors que je m'occupe d'elle, la faisant passer en priorité depuis toujours... Je me sens ravagé intérieurement et je crois que cela se ressent dans la rapidité de mes paroles. Elle est donc rentrée en disant qu'elle avait besoin de se reposer, d’être seule pour au final, appeler mon coloc pour qu'il vienne la voir ! C'est un peu du foutage de gueule surtout qu'en plus, je sais qu'il n'est pas du style sérieux enfin bref c'est complexe! avais-je repris confus. Je trempais mes lèvres à nouveau dans la douceur liqueur.

Elle éclate d'un rire amusé à la question d'Emrys. Il était pas top avec toi en gros ? Bien sûr, elle aurait pu se faire passer pour la victime de l'histoire et blâmer son ex pour tous ses malheurs, mais Vic ne mentait que si ça l'arrangeait. En l'occurence, elle n'avait aucune raison de se faire passer pour la colombe dans l'histoire. Nan, il était super, c'est moi qui ai déconné. C'est vrai, il était super, mais elle n'avait jamais été amoureuse de lui. Ils étaient bien ensemble, ils se correspondaient, et surtout il la traitait comme une princesse. Si l'addiction aux jeux d'argent trop ancrée en Vic n'avait pas assombri le tableau, elle serait probablement toujours à Philadelphia à l'heure actuelle. Une confidence en amenant une autre, c'est au tour d'Emrys d'exprimer ses ennuis. Ma sœur a eu un accident. Désolée, j'espère qu'elle va bien. Il reprend son histoire en disant que sa soeur est sortie de l'hôpital, et si elle avait pris rapidement la décision de rentrer chez elle, elle ne devait pas être si amochée. Vic prend l'initiative de servir un spicy shot au jeune homme alors qu'il termine son histoire. Ok, je vois. J'veux pas être désagréable ou me mêler de ce qui ne me regarde pas... C'est pourtant exactement ce qu'elle s'apprête à faire. Mais à moins que ta soeur soit encore mineure, c'est une grande fille. Et ça peut se comprendre que parfois une fille préfère voir un ami, ou plus, j'sais pas quelle relation elle a avec ton coloc, plutôt que son frère. C'est ses affaires, non ? Vic trouvait la réaction pour le moins excessive et à la place de la soeur en question, elle aurait probablement envoyé balader Emrys.

L’attirante barmaid me coupe direct. Elle avoue que la faute lui revient. Je ne sais pas quoi dire. Je ne pipe pas mot. Si d’abord, la belle se montre désolé pour ma sœur et du fait, pour moi. Je sens qu’au fil de mon histoire, son visage change un peu. Elle sort son air franc et explique son avis sur le sujet. Je me montre attentif. Je comprend chacun des mots. La vérité blesse. J’émets quelques réserves tout de même. Je ne dis rien pour le moment. Je la laisse poursuivre et j’analyse. Oui je suis bien d’accord avec ces propos, mais la jeune femme ne connaît pas notre relation donc forcément elle ne peut pas comprendre. Lola est beaucoup sur moi et demande beaucoup après moi. Elle a aussi instauré cette façon de faire. La belle termine un peu durement. Je suis d’accord avec ce que tu dis, mais... je marque une pause cherchant comment lui expliquer le fond de ma pensée.Je m’enfile le shot qu’elle m’a servit et je le lève juste avant comme pour trinquer. En gros, ma sœur a toujours créé ce côté comme si j’étais son père, elle en est demandeuse de ce côté fusionnel donc bah on peut pas me reprocher aussi de me mêler parce que j’ai pas créer ça tout seul tu vois ! Je grimace. Mais après je suis d’accord et c’est aussi en partie pour ça que je suis comme ça parce que je me gave! Petit rire avec une pointe de désespoir.